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En 2017, les zones franches turques ont enregistré un volume d’échanges de 20,4 Mds USD, dont 11,6 Mds USD d’exportations et 8,8 Mds USD d’importations. Après trente ans d’existence, les premières zones franches turques voient actuellement leurs baux se renouveler. Actrices importantes de l’économie turque,elles cherchent désormais à amender leur cadre juridique pour accroître les incitations à y investir. A cet égard,les zones franches seront à l’avenir plus tributaires encore des orientations politiques, la délivrance des licences d’exploitation relevant désormais de la Présidence de la République.
1. Des zones d’investissement spécial visant à stimuler les exportationset monter en gamme
Les zones franches turques constituent, aux côtés des zones industrielles organisées et des technoparcs, deszones d’investissement spécial. Les principaux objectifs de la création de zones franches étaient de stimuler les exportations et les IDE, mais aussi de permettre l’acquisition de nouvelles technologies. Pour cela, ellesbénéficient de dispositifs incitatifs à l’investissement dont le libre transfert des profits à l’étranger ou en Turquie, l’exemption de droits de douane, d’impôt sur les sociétés (pour les entreprises manufacturières), de TVA, detaxe foncière et de frais d’acte de vente.
Les premières zones franches apparaissent en Turquie dans la foulée de la loi n°3218 de 1985, celle de Mersin devenant opérationnelle dès 1987. Les créations les plus récentes (Kocaeli, Denizli et Bursa) remontent à 2000. Elles sont aujourd’hui au nombre de 19, essentiellement localisées dans la région de Marmara (Istanbul) et dans le sud-ouest du pays. En 2016, elles accueillaient 2025 entreprises, dont 530 entreprises étrangères et employaient 66 095 personnes. La dernière création de zone est en cours à Karaman (sud), avec unestructure qui se spécialisera dans les produits agroalimentaires. A l’inverse, faute d’un niveau suffisant d’activité, les zones franches d’Erzurum (nord-est) et Mardin (sud-est) ont été fermées.
L’activité varie sensiblement selon les zones franches : de 1,1 M USD pour Rize à 4,1 Mds USD pour Egée (la surface et les employés influent aussi : de 1 ha et 4 employés à Rize à 220 ha et 19 606 employés à Egée). Les zones d’Egée, Bursa et Mersin représentent près de 60% des emplois dans les zones franches turques. Par ailleurs, la complexité des procédures dans le montage des dossiers limite de fait le profil des entreprises présentes à des grandes entreprises exclusivement.
2. Les zones franches affichent un excédent commercial et des échangesdominés par l’Union européenne et les produits industriels
Les échanges réalisés par les zones franches turques sont passés de 8 Mds USD en 2001 à 20,4 Mds USDen 2017, dont 11,6 Mds USD d’exportations et 8,8 Mds USD d’importations – soit un excédent commercial de 2,8 Mds USD. La progression devrait se poursuivre en 2018, les échanges ayant crû de 11% en g.a. sur leshuit premiers mois de l’année. Les échanges sont toutefois en baisse constante entre 2013 et 2016 et passent ainsi de 23,2 Mds USD à 19 Mds USD (-18%), avec des évolutions différenciées : de +533% pour Trabzon et +52% pour Adana à -65% pour Gaziantep et -73% pour TÜBITAK-MAM. 2017 a toutefois vu les échanges repasser la barre des 20 Mds USD.
Plus important partenaire commercial de la Turquie, l’Union européenne représentait en 2017 près de 33% ducommerce des zones franches : celles-ci exportaient 3,8 Mds USD vers l’UE et en importaient 2,8 Mds USD. Le marché domestique turc représente l’autre partenaire majeur des zones franches (32%) : elles y exportaient4,1 Mds USD et en importaient 2,4 Mds USD. Les régions Afrique du Nord/Moyen-Orient et CEI représentant quant à elles respectivement 10% et 4,4% des échanges des zones franches. Des investissements asiatiques croissants, en premier lieu chinois et japonais, sont observés ces dernières années.
Les produits industriels constituent le principal poste d’échanges des zones franches, représentant 17 MdsUSD (soit 84% des échanges), loin devant les fruits et légumes (8,8% des échanges, en baisse à 1,8 MdUSD). Sur 2861 licences d’exploitation actives en 2016, 1242 concernaient le négoce et 956 la production.
3. Si les zones franches ont permis l’émergence de pôles de compétitivité sectorielle, leurs objectifs initiaux ne sont que partiellement atteints
Les exportations des zones franches ont régulièrement progressé entre 1987 et 2011. A cette date, elles représent aient près de 7 Mds USD, soit l’équivalent de 5,1% des exportations turques. Pour autant, l’objectif initial de stimulation des exportations vers des pays tiers n’est pas pleinement atteint puisque, sur la période,plus de 60% des exportations des zones franches étaient destinées à la Turquie. Cet état de fait s’explique par un autre objectif initialement fixé aux zones franches, à savoir la fourniture d’intrants à bas coût sur le marché domestique.
L’objectif est levé en 2008 et, à partir de cette date, les mesures d’incitation à l’investissement dans les zones franches sont réorientées afin d’encourager les flux à destination des paystiers (seules les entreprises exportant plus de 85% de leur production vers ces pays sont ainsi exemptéesd’impôt sur les sociétés). Ce recentrage stratégique a porté ses fruits puisque, en 2011 et pour la premièrefois depuis 1987, la part des pays tiers dans les exportations des zones franches a dépassé celle de la Turquie.
Concernant les IDE, seules 20% des entreprises opérant dans les zones franches étaient totalement oupartiellement étrangères (2011). Sur les 30 000 sociétés étrangères présentes en Turquie, 500 l’étaient dansles zones franches, et ces dernières attiraient 1,1% des flux d’IDE. Ces flux étaient concentrés dans quelquesgrandes zones, dont Egée (52% des flux) et Europe (23%). De même, en 2016, la majorité (2126) des licences était accordée à des acteurs locaux, les entités étrangères ne comptant que 735 licences.
Par ailleurs, les zones franches encouragent de fait les regroupements sectoriels : la concentration d’une main d’œuvre qualifiée et l’implantation d’entreprises étrangères susceptibles d’accroître le savoir-faire des entreprises turques ont permis des gains en spécialisation et en productivité. Des pôles de compétitivité sectoriels sont ainsi apparus dans certaines zones, notamment les yachts à Antalya, l’automobile à Bursa, lecuir à Izmir, la sidérurgie à Kayseri, le textile à Mersin ou encore les composants et pièces et véhicules àKocaeli.
Les zones franches ont ainsi permis de développer des activités de niche : à titre d’exemple, la zone franche d’Antalya est devenue un pôle majeur de construction de yachts de luxe et a vu le nombre de sociétés du secteur passer de 3 en 2001 à 55 en 2017. Celles-ci cherchent désormais à développer leurs activités derecherche et développement en vue de s’affranchir de technologies étrangères, conformément aux objectifsfixés par le gouvernement lors de leur création. Les autorités turques vont elles-aussi en ce sens enencourageant la production de produits de haute technologie, mais aussi l’essor des services.
L’existence de zones franches a également eu un impact sur le budget de l’Etat. La création et la gestion des zones franches est, à l’origine, le propre de l’Etat turc. Par la suite, d’autres zones ont été établies selon des schémas incluant le secteur privé, que le foncier soit public (build-operate-transfer) ou privé (build-operate). A l’heure actuelle, les autorités turques insistent sur la responsabilité de bout en bout des entrepreneurs, qui doivent monter un dossier prouvant la faisabilité et la durabilité de leur investissement, et ce afin de limiter l’impact sur la dépense publique. La réciproque est la grande marge de manœuvre dont disposent les entreprises, les secteurs retenus par les autorités n’étant qu’une valeur indicative.
Depuis 1986, l’investissement total cumulé du secteur privé dans les zones franches s’est élevé à 5 Mds USD, contre 35 MUSD pour la sphère publique. En outre, le manque à gagner représenté par les exemptions fiscales et de droits de douane est par exemple compensé, dans une moindre mesure, par les revenus issus des licencesd’exploitation et d’entreposage, des loyers et d’une ponction sur les profits annuels des opérateurs. Pour lapériode 1986-2011, les zones franches ont ainsi généré près de 1,1 Md USD au profit de l’Etat.
Au-delà de constituer un revenu minime pour l’Etat (1,1 Md USD en 25 ans) pour un investissement public très limité (35 M USD), les zones franches ont ainsi pu avoir un effet de levier significatif pour stimulerl’investissement privé et la croissance économique. En outre, entre 2009 et 2018, la réduction du nombred’entreprises présentes (divisé par deux) et la forte progression des échanges traduisent une intensificationde la productivité des zones.
L’un des enjeux futurs réside dans la diversification et la montée en gamme de la production. A cette fin, les zones franches turques bénéficient d’une main d’œuvre locale plus qualifiée que celle de leurs concurrentes étrangères. C’est d’ailleurs le principal avantage compétitif avancé par le Président du conseil des zones franches de la TOBB. Celui-ci voit aussi l’essor des services (tourisme médical, services financiers) comme un futur relais de croissance. Le profil des zones franches révèle également le poids écrasant de l’industrie, et donc l’importante marge de progression pour des secteurs par ailleurs majeurs en Turquie (agriculture).
Des projets de nouvelles zones existent, dont une zone réservée aux investisseurs chinois (annonce duMinistre Zeybekci en avril 2017) et une zone attenante au nouvel aéroport d’Istanbul et dédiée au commerceen ligne et à la logistique (annonce du Ministre Zeybekci en juillet 2017).
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